Ciao bella : la mort de Claudia Cardinale

Publié le par O.facquet

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« La vengeance est plus douce que le miel »

Homère, L'Illiade

 

Tout a été dit, ou presque, sur Il Était une fois dans l'Ouest, le film emblématique de Sergio Leone, sorti en 1968, parangon ultime du western spaghetti. Dario Argento et Bernardo Bertolucci ont aussi participé à l'écriture du scénario.

 

News du film Il était une fois dans l'Ouest - AlloCiné

 

Oui, tout a été dit, sur la qualité remarquable de l'ornementation, sur le sens absolu de la mise en scène du cinéaste italien, sur ce cinéma de la sensation pure, sur le cynisme, voire le sadisme, le hiératisme imposant dans la posture des personnages, qui résument leur sèche humanité, une majesté qui vient se déployer avec une élégance chorégraphique ; tout a été écrit, également, à peu de choses près, sur leur mutisme, sur l'emploi de silhouettes marmoréennes vêtues de longs manteaux qui s'imposent presque comme des signatures du réalisateur à l'intérieur même de son film, sur ce suspens contemplatif, sans oublier, bien entendu, la musique du grand Ennio Morricone (le maestro), qui offre à elle seule la profondeur lyrique du film, d'où qu'on ait pu parler d'un style opératique chez Leone (Vincent Ostria) ; une musique tout à la fois angoissante, lancinante et élégiaque, laquelle fait résonner de façon grandiose Il Était une fois dans l'Ouest, aussi désabusé thématiquement que sublime et démesuré -voir à ce sujet Ennio, sorti en 2021, le film documentaire incontournable de Guiseppe Tornatore.

 

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Des histoires de destinées humaines qui donnent naissance aux mythes (Serge Toubiana). Des histoires qui sont en l'occurrence la propriété de la mythologie américaine, revue et corrigée par un cinéaste européen (Wim Wenders agira de même). Rien que cela. Notons que Leone la déconstruit moins qu'il ne la sublime. Le protagoniste central du film est de surcroît le temps : un désir de mémoire, une vengeance ruminée, ressassée, qui repasse par les vestiges du passé. Le plat va se manger très froid, glacé. Nul pardon. Une revanche acharnée qui ira à son terme. Well done laisse entendre et voir le réalisateur. « Quand la légende est plus belle que la réalité, imprimez la légende » profère un des protagonistes de L'Homme qui tua Liberty Valence de John Ford, sorti en 1962, l'acmé du western classique ; quant à Sergio Leone, tout son savoir-faire original est de parvenir à mêler inextricablement légende et réalité.

 

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Le maniérisme de Sergio Leone consiste dans la volonté du cinéaste d'étirer le champ de l'action, de créer ainsi un espace-temps, mélancolique et éblouissant, prosaïque et baroque, un espace-temps qui ne répond qu'à une logique mentale, hypnotique ; une réussite étourdissante. Un cinéma comme on n'en fait plus, les nouveaux rythmes, les stéréotypes du temps, ne le permettent pas, les conditions financières tout autant, d'où une pénurie de récits légendaires cinématographiques, depuis la mort de Sergio Leone en 1989, et la sortie de sa dernière œuvre : Il Était une fois en Amérique, sorti en 1984, un film-somme testamentaire.

 

Il était une fois dans l'Ouest - L'arrivée de la ravissante Jill McBain à  la gare - YouTube

 

La littérature foisonnante sur le cinéma de Sergio Leone abonde d'analyses plus pénétrantes les unes que les autres, pourtant, si la direction d'acteurs est toujours évoquée, elle l'est trop souvent d'une façon abstraite, très intellectualisée, en un mot désincarnée.

 

Claudia Cardinale a refusé d'apparaitre nue dans "Il était une fois dans l' Ouest" : "Je ne supporte pas de vendre mon corps"

 

Pourtant, le casting d'Il Était une fois dans l'Ouest ne manque pas d'incarnations fortes, érotiques, osons le dire : Henry Fonda (Frank), Charles Bronson (Harmonica), Jeson Robards (Cheyenne, au romantisme désuet), Jack Elam (Snaky), Woody Strode (Stony), et, bien entendu, Jill McBain, jouée par Claudia Cardinale, qui hérite du rôle d'une jeune veuve généreuse au passé sulfureux (elle officiait jadis dans un bordel de la Nouvelle-Orléans), l'unique personnage féminin du film. Sans cette distribution prestigieuse, sans la direction d'acteurs sourcilleuse et exigeante de Sergio Leone, un réalisateur à la méticulosité maladive, le film ne présenterait pas la même force, à coup sûr, perdrait en intensité, en cohérence, vraiment, la dialectique des regards chère au cinéaste à cet égard s'émousserait -on pense bien sûr au duel final opposant Frank (tueur sans scrupule, hors la loi impénitent) et Harmonica (mystérieux vengeur, taciturne anonyme), et à son accumulation de regards intenses, lesquels n'attendent rien d'autre que l'attente de leur propre sens.

 

Il était une fois dans l'Ouest - Il était une fois le cinéma

 

Tout un art. Inimitable. Le bruit du vent poussiéreux ; le soleil insolent dardant ses rayons sur deux hommes qui se toisent du regard dans un paysage désolé, et l'un d'eux ne survivra pas au combat en cours. Harmonica tire le premier : il blesse mortellement Frank, qui trépasse dans une ultime expiration, un harmonica dans la bouche. Tout se paie un jour. N'oublions pas, surtout, d'évoquer ici encore la partition géniale d'Ennio Morricone durant la séquence du duel, sublime, donc inoubliable, il va sans dire.

 

Le Deblocnot': IL ETAIT UNE FOIS DANS L'OUEST de Sergio Leone (1968) par  Luc B.

 

Le film perdrait en outre, et surtout, de son intérêt sans l'interprétation magistrale de Claudia Cardinale. La grâce féline et le charisme vigoureux de l'actrice, cet indéfinissable charme, cette séduction insondable, quoi qu'on en pense, quoi qu'on en dise, lesquels ont hypnotisé avec ce film des générations de spectateurs de tous horizons, ensorcelés par le magnétisme animal et désarmant de Jill McBean, vaillante, fragile et vulnérable, envoûtés par ce regard noir, perçant, anxieux ou menaçant ici, là charmeur, quémandeur, inquiet ou dépité, pour tout dire fascinant, ô combien fascinant. La perfection plastique (une aberration génétique, à l'instar d'Alain Delon), n'explique pas tout, surtout pas : il y faut en effet par dessus tout du talent, et énormément de travail, du courage également, de l'humilité et de la respectabilité, bien sûr, une tête bien faite, évidemment, loin des caméras et des sunlights, à l'écart du monde futile et illusoire du showbizness. Une intelligence tempérante qui ne laissa pas insensible Alberto Moravia, un ouvrage de l'écrivain en témoignera. Une vertu cardinale. D'aucuns ont prétendu qu'Il était une fois dans l'Ouest était dénué de tout sentiment. Il faut s'inscrire en faux avec ce constat. La présence seule de Claudia Cardinale, en Jill McBean pour l'éternité, suscite à jamais une émotion tenace. Le miracle Grace Kelly qui persiste au milieu de mâles sudoripares et mal rasés à la testostérone flamboyante.

 

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Une séquence, portée par la musique idoine d'Ennio Morricone, reste dans les mémoires : Jill arrive en train à Flagstone afin de rejoindre son mari ; la caméra la surprend à la descente du wagon, personne pour l'accueillir, une forme d'inquiétude se lit sur son visage, elle regarde sa montre, des factotums se chargent de ses bagages, un travelling arrière l'accompagne jusqu'au chef de gare : à travers une fenêtre ouverte, nous les voyons deviser dans un bureau à l'aide d'un travelling latéral. La caméra s'élève délicatement dans les airs, survole tranquillement la gare, se fige, et dans une vue panoramique : nous discernons Jill au loin, perdue dans la foule et le brouhaha urbain, chercher une carriole -un être vous manque et tout est surpeuplé. Un nouveau travelling arrière la précède sur le chemin qui la mène vers la maison de son époux, installée sur une charrette, le visage figé, le regard fixe, sans expression particulière. Somme toute, l'histoire du film aura été centrée sur l'unique personnage féminin, prête à tout pour survivre, et fidèle à ses origines modestes, comme l'illustre, à la toute fin du film, l'aide qu'elle apporte aux ouvriers : Jill déboutonne le corsage de sa robe, dénude dans un même mouvement ses épaules, et leur apporte de l'eau fraîche. Nous restons cois : une puissance de séduction immarcescible qui atteint ici au prodige. Pourquoi le cinéma. Définitivement.

Ciao bella : grazie mille. Che Dio ti protegga.

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Scène de la première apparition de Claudia Cardinale dans le film de Sergio  Leone Il Etait Une Fois Dans L'Ouest avec la musique d'Ennio Morricone  #pépites_vidéoclip #nostalgie #bestmovieclip | Zen Attitude |

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Publié dans pickachu

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