Infidèle (vade castro satanas)

Publié le par facquet

                                                                                                                                                                                                                    Des goûts et des couleurs on ne dispute point avertit le proverbe. Prise au pied de la lettre, la sentence est-elle une invite insidieuse à taire ses dé-goûts (un manque d'inclination pour quelque chose ou quelqu'un), en tout état de cause, afin de satisfaire aux exigences arbitraires de la bienséance ? Peu importe. Le Che de Steven Soderbergh déçoit, le second volet semble plus rébarbatif encore que le premier. C'est comme ça. Parlons-en. Le fond, une hagiographie en belle et due forme (imagerie sulpicienne), agace. La forme, cossarde, ennuie. Deux heures, en ce cas, c'est interminable. On a beau y retourner deux fois, au cas où, eh bien, rien à faire, la déception l'emporte. Moins pour ce que dit Che (encore que...), que pour la façon dont il le dit. D'autres pensent différemment, voir les films, donc.
D'aucuns disent en effet Guerilla (volet numéro 2) plus complexe que le précédent. Le récit et sa mise en forme seraient faussement plats, et à très bien y regarder, il y aurait même un jeu de miroir à la fois dialectique et signifiant entre les images. Trop subtil. Désolé. Surtout, il y a cette ellipse éludée. Exeption faite de quelques fash-forwards (contraire du flash-back) dans L'Argentin (premier volet), l'emploi du temps d'Ernesto Guevara, de 1959 à 1965, est remisé aux oubliettes de l'Histoire. Ce n'est pas un hasard, ô que non ! Ceci explique certainement d'ailleurs cela. Soderbergh filme sans risque ce que tout un chacun connaît ou fantasme sur saint Che, il occulte les zones d'ombre (La face cachée du Che de Jacobo Machaver ou Lettre à Fidel Castro de Fernando Arrabal avec une préface inédite de Guillermo Cabrera Infante chez Librio), et voilà le résultat : une insignifiance portée par une mise en scène paresseuse, bien que parfois efficace, encore heureux de la part d'un cinéaste à ce point aguerri.
Tant qu'à faire, autant revoir le Che de Richard Fleischer (1969, avec Omar Sharif dans le rôle de Guevara et Jack Palance dans celui de Castro), s'épargner ainsi de longues minutes soporifiques.
Dans son premier film (2005), l'acteur Andy Garcia (né Andrès Arturo Garcia y Menèndez  le 12 avril 1956 à Cuba) ne raconte pas seulement une histoire d'amour poignante (Inés Sastre, définitivement craquante), la soudaine décomposition d'une famille bourgeoise cubaine humaniste, ou la lutte périlleuse menée contre l'infâme dictateur Batista (marionnette des USA) et ses sbires par des résistants attachés aux Droits de l'Homme et à leur respect, des combattants oubliés de nos manuels scolaires, entre autres. Non. A.Garcia (fidèle soutien de Barack Obama) filme adroitement -on passe des Feux de l'amour (photographie (trop?) somptueuse) au film politique traditionnel hollywoodien sans coup férir- une autre révolution (désillusion), un autre Che, bêtement stalinien (pléonasme), chef d'orchestre de la Terreur castriste, stalinisme tropical, en 1959, dans la forteresse majestueuse de la Havane, désormais de triste mémoire ("La Terreur est à venir" dit Sartre à Casro en 1960, entendu dans Sartre par lui-même, réalisation Alexandre Astruc et Michel Contat, 1976). Le tout est d'une facture classique dynamitée par un Bill Muray désenchanté, philosophe allumé, dont la bouffonnerie décalée illumine Adieu Cuba (The lost city), une oeuvre à (re)découvrir. Andy Garcia rend hommage à son pays natal. Un film sans prétention, honnête, un bon travail d'artisan du cinéma, un habile mélange des genres, avec des personnages à la Malcom Lowry (mélancoliques, voire désabusés). Une petite perle. Une ambiande musicale chaude, très chaude (buena vista social club). Bonjour La Havane : Soderbergh à la revoyure, et sans rancune. Viva Cuba libre !

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Publié dans pickachu

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