Fin de série ?

Publié le par O.facquet

 

 

   

 

 

 

 

 

 

 

Les séries américaines télévisées suscitent depuis toujours une saine curiosité (Columbo, parmi tant d'autres). Elles ont récemment pris du galon (De Dream on à La Maison blanche en passant par Twin Peaks, Les Soprano, Prison BreakSix Feet Under, Cold Case ou Urgences). A la Noël, comme à la Saint Sylvestre, le 15 août, voire à Paques, toutes la sainte semaine, la sainte journée, chaque jour à la pause méridienne, les séries made in USA font beaucoup parler et écrire. Elles sont devenues au fil des ans un sujet de conversation tantôt léger tantôt sérieux. Grâce à des auteurs talentueux innovants : Michael Chrichton, David Lynch, David E.Kelley (Boston Public, la préférée), J.J.Abrams, Meredith Stiehm, John Wells, Aaron Sorkin, Alan Ball, Darren Star, Steven Bocho et David Milch, Marta Kauffman et David Crane, Paul Scheuring, Jenjy Kohan, Magai Levi (créateur de la série télévisée israélienne Be Tipul qui a inspiré En analyse, une excellente série nord-américaine)... La liste n'est pas exhaustive, bien entendu. Spéciale dédicace, enfin, pour la chaîne H.B.O. sans laquelle rien de tout cela n'aurait été possible.

De nombreuses études savantes s'efforcent de les percer à jour : Philosophie en séries de Thibaut de saint Maurice, pour ne citer que celui-là. Des ouvrages universitaires, entre autres, se penchent régulièrement sur le phénomène, voir les très bons Desperate Housewives, un plaisir coupable ? de Virginie Marcucci et De quoi les séries américaines sont-elles le symptôme ? de François Jost , et ils ne sont pas les seuls. Du lourd. En outre, Les cahiers du cinéma ( Séries : l'âge d'or en juillet-août 2003 et Séries, une passion américaine en juillet-août 2010), Télérama (Le pouvoir des séries, Mad men, etc., février/mars 2011) pour ne citer que ces revues, leur ont consacré plusieurs numéros spéciaux plutôt fouillés. Dernièrement, un esprit vif s'est même risqué à défendre une hypothèse audacieuse : la série US serait l'avenir du cinéma, rien de moins (Les séries télévisées : l'avenir du cinéma ? de J.P. Esquenazi). Prudence. Le cinéma en a vu d'autres..

 

Prenons Weeds. Sans conteste la série américaine la plus barrée, la plus créative qu'on ait jamais tournée. On ne fait pas mieux sur le petit écran sur la période récente. Des épisodes de vingt minutes. Un truc dingue, vraiment, d'une immoralité sensuelle ; difficile de décrocher, à coup sûr -1941 de Steven Spielberg est son pendant cinématographique le plus allumé. Ne rien dévoiler, toutefois. De la discrétion. Deux ou trois mots seulement, pas plus : les scénaristes osent tout, les metteurs en scène font montre d'une maîtrise ouverte du temps et de l'espace à couper le souffle. Les différents protagonistes de la série conservent une étrange complexité malgré (grâce ?) les contraintes du genre. Et la télévision française, qu'a-t-elle produit pour rivaliser sur ce terrain-là ? Nous tenons avec Weeds un petit chef-d'oeuvre télévisuel qui n'a pas fini de faire causer. Et un des plus beaux personnages de fiction jamais imaginés : Nancy Botwin, la radieuse Mary-Louise Parker. Le genre semble désormais à son apogée. Or, présentement, quelques-unes d'entre elles déçoivent, et pas les moindres. Mad Men ou Boardwalk empire, par exemple, deux succès planétaires, nonobstant d'indéniables qualités, ne laissent pas d'inquiéter quant à l'avenir proche de la série yankee. Chacune a perdu l'innocence, la candeur, la spontanéité, la fraîcheur des aînées, attributs indispensables à leur originalité. Un esprit envahissant de sérieux s'est invité. La tentation stérile de chercher à rivaliser avec le cinéma les plombe. Boardwalk empire et Mad Men se regardent faire. Un jeu de miroir paralysant. Rien n'est laissé au hasard qui, pourtant, dit-on, fait bien les choses. La série américaine s'asphyxie, devient rébarbative : une forme d'académisme mortifère s'impose. Tout est devenu trop parfait pour être honnête. La série US, ainsi ossifiée, devient sourde au subtil et équilibré mélange d'humour et de gravité qui enchantait le petit écran hier encore. Lorgner sans nuances vers le cinéma est une impasse funeste. Cultiver au contraire, encore et toujours, sa singularité.

    

Private practice (2010), actuellement diffusée le dimanche soir sur France 2, un surgeon de Grey's anatomy, un erzat réussi d'Urgences, reste la gardienne des techniques et pratiques qui ont permis le succès d'un genre indispensable aujourd'hui à nombre de cinéphiles téléphages. A vos télécommandes. 

 

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Publié dans pickachu

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